Le laser : Fondamentaux

La synchronisation des modes en phase

La deuxième méthode est complètement différente. Cette fois, on laisse l'oscillateur laser atteindre un état stationnaire et on ne bloque pas l'oscillation de la lumière dans la cavité. En revanche, on empêche la cavité de se remplir de photons en tout endroit en même temps : on autorise simplement un paquet de photons à se propager dans la cavité. Cette impulsion a une durée inférieure au temps d'aller et retour dans la cavité. Dit autrement, son extension spatiale est nettement inférieure à la longueur de la cavité. On oblige ainsi les photons stimulés à s'accumuler uniquement dans cette impulsion.

La méthode pour arriver à ce régime est d'utiliser un modulateur de lumière rapide capable de hacher la lumière présente dans la cavité avec une période exactement égale au temps d'un aller et retour. Ainsi, seuls les photons qui traversent le modulateur alors qu'il est passant pourront s'amplifier et retrouveront le modulateur dans son état passant après chaque aller et retour. Les autres photons situés ailleurs de la cavité subiront des pertes à chaque passage dans le modulateur (figure 20).


   
    Figure 20 : Impulsion se propageant dans la cavité en régime de synchronisation des modes en phase.
Figure 20 : Impulsion se propageant dans la cavité en régime de synchronisation des modes en phase. [zoom...]

En général, la durée des impulsions est nettement inférieure au temps d'aller et retour dans la cavité. Elle est fondamentalement limitée par la transformée de Fourier du spectre qui est émis par le laser. Plus le spectre émis est large, plus l'impulsion est courte. Ainsi, il est possible de générer des impulsions de quelques femtosecondes seulement, grâce à un milieu amplificateur exceptionnellement large (le saphir dopé au titane, dont la largeur spectrale dépasse 300nm).

La figure 20 montre qu'une seule impulsion voyage dans la cavité. Cependant, en sortie du laser, on voit un train d'impulsion, généré à chaque passage de l'impulsion sur le miroir de sortie. La périodicité du train est égale au temps d'aller et retour dans la cavité (soit quelque nanosecondes seulement, en général).

La puissance moyenne émise par ce type de laser est en général la même que celle qui est émise en régime purement continu. En fait, contrairement au régime déclenché, le laser atteint ici un régime stationnaire comme en régime continu. La différence vient du fait que les photons stimulés sont concentrés dans un paquet de photons localisé dans la cavité au lieu d'être répartis dans toute la cavité. Dans une durée d'un aller et retour, il sort une seule impulsion du laser, via le miroir de sortie. L'énergie de l'impulsion en sortie est donc égale à la puissance moyenne multipliée par la durée d'un aller et retour. En général, les énergies se situent dans le domaine du nanojoule.

Ce régime impulsionnel s'appelle "synchronisation des modes en phase". Ce terme provient de l'analyse en fréquence. En effet, un laser fonctionnant dans ce régime émet forcément sur plusieurs fréquences du fait de la modulation rapide qui est imposée par le modulateur. Ces fréquences sont également celles qui sont imposées par la cavité, toutes espacées de c/2L : les modes longitudinaux de la cavité.

En fait, contrairement à ce que le sens commun laisse prévoir, les modes longitudinaux interfèrent même s'ils ont une fréquence différente car ils sont confodus spatialement. Par exemple, si le laser émet continûment sous la forme de deux fréquences séparées de C/2L, le signal lumineux en sortie résultant de l'interférence des deux ondes sera modulé par un terme sinusoïdale de fréquence c/2L. Cette modulation est en général très rapide (période de quelques nanosecondes pour une cavité d'une longueur de l'ordre du mètre). Pour la voir, il faut une détection suffisamment perfectionnée (photodiode et oscilloscope rapide). Il s'agit d'un battement de fréquences, résultant de l'interférence de faisceaux ayant des fréquences différentes.

Lorsqu'il y a plus de fréquences émises par le laser, le signal de battement devient assez complexe. Sa forme dépend de la phase relative des ondes ayant des fréquences différentes. Cependant il existe un cas particulier où le signal de battement a une forme très régulière : lorsque toutes les ondes émises par la cavité sont en phase. Dans ce cas, il existe certains moments et certains points de la cavité où toutes les ondes battent en phase. Le signal d'interférence est alors très intense (figure 21).


   
    Figure 21 : Signal de battement (en sortie de la cavité) lorsque tous les modes sont en phase comparé à un signal de battement (en bleu) avec des phases aléatoires entre les modes (en rouge).
Figure 21 : Signal de battement (en sortie de la cavité) lorsque tous les modes sont en phase comparé à un signal de battement (en bleu) avec des phases aléatoires entre les modes (en rouge). [zoom...]

Lorsque les modes longitudinaux sont en phase, il y a un seul endroit dans la cavité où les amplitudes des champs électriques s'ajoutent constructivement. Tout se passe comme si une impulsion voyageait à l'intérieur de la cavité et on retrouve la description faite au début de cette partie (figure 22).


   
    Figure 22 : "Photographie" à un instant donné. Les différentes sinusoïdes représentent l'amplitude du champ électrique pour les différents modes de la cavité.
Figure 22 : "Photographie" à un instant donné. Les différentes sinusoïdes représentent l'amplitude du champ électrique pour les différents modes de la cavité. [zoom...]
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