Holographie: Enregistrement / Reconstruction

Enregistrement d'un hologramme

Principe de diffraction

Considérons un objet étendu éclairé par une onde monochromatique, localisé à la cote par rapport au plan d'enregistrement. Cet objet diffracte une onde vers ce plan d'observation situé à la distance . La surface de l'objet illuminé génère un front d'onde que nous noterons

L'amplitude décrit la réflectivité de l'objet et la phase décrit son état de surface et son relief. Compte tenu des résultats de la théorie de la diffraction dans les conditions de Fresnel, le champ diffracté à la cote est exprimé par une intégrale dont l'expression est la suivante :

La figure 1 illustre la géométrie de la diffraction ainsi que les variables utilisées.


   
    Figure 1: Diffraction en champ libre et notations
Figure 1: Diffraction en champ libre et notations [zoom...]

Le champ diffracté est simplement égal à la transformée de Fresnel de la répartition d'amplitude en surface de l'objet. Dans le plan d'observation, cette onde peut également s'écrire sous la forme simple suivante :

avec le module de l'amplitude complexe et la phase. Compte tenu que l'objet est naturellement diffusant, car non poli, le champ diffracté à la cote distance est un speckle. C'est à dire que la répartition d'amplitude et de phase dans le plan d'observation est aléatoire. La phase est donc aléatoire du fait de la rugosité naturelle de l'objet et nous considérerons qu'elle est uniforme sur .

Principe interférométrique

Le procédé holographique nécessite de constituer des interférences pour coder l'information. Ainsi, l'onde diffractée par l'objet est mélangée de façon cohérente avec une onde de référence dans le plan d'observation. Les interférences entre les deux ondes nécessitent l'utilisation d'une source spatialement et temporellement cohérente (laser typiquement), et se traduisent par un motif d'intensité représentant le module au carré de la somme des deux amplitudes complexes. La figure 2 illustre la géométrie du mélange interférentiel.


   
    Figure 2 : Interférences entre l'onde diffractée et l'onde de référence
Figure 2 : Interférences entre l'onde diffractée et l'onde de référence [zoom...]

Ainsi, notons l'amplitude complexe du front d'onde de référence au plan d'enregistrement :

avec le module de l'amplitude complexe et la phase du front d'onde. L'onde référence est généralement issue d'un trou source : elle est donc sphérique divergente et en incidence oblique sur le support d'enregistrement. Si on note les coordonnées du point source dans le repère du plan de l'hologramme , la phase optique de l'onde de référence s'écrit dans les approximations de Fresnel comme suit :

Sa phase optique peut donc aussi s'écrire sous la forme :

sont les fréquences spatiales porteuses, est le rayon de courbure de l'onde et est une constante. Généralement on s'arrange pour que l'onde soit uniforme, c'est à dire . L'éclairement total reçu par le support holographique s'écrit :

Cette équation peut encore s'écrire sous la forme :

Ainsi représente l'éclairement du support holographique lors de l'exposition. L'énergie reçue est fonction du temps d'exposition et de l'éclairement telle que :

Les principaux facteurs physiques caractérisant un support photosensible sont le facteur de transmission (où est le flux incident et est le flux transmis par le support d'enregistrement après son développement), la densité optique du négatif , la saturation du support (W/cm2) et la sensibilité moyenne de celui-ci (J/cm2).

La caractéristique reliant la transmission en amplitude en fonction de l'exposition du support photosensible présente une zone linéaire centrée sur l'exposition . La spécificité principale repose sur le fait suivant : si nous avons une exposition sinusoïdale du type dans la zone de linéarité d'enregistrement du support, alors la transmission en amplitude du négatif sera proportionnelle à l'éclairement reçu et on aura , comme le montre la figure 3. Le coefficient représente la dérivée de la transmittance par rapport à l'exposition au point de coordonnées  pour l'exposition moyenne.


   
    Figure 3 : Courbe de la transmission en amplitude en fonction de l'exposition sur un support d'enregistrement
Figure 3 : Courbe de la transmission en amplitude en fonction de l'exposition sur un support d'enregistrement [zoom...]

Une fois l'exposition achevée, le support photosensible est développé généralement par bain chimique afin d'obtenir un négatif codant la phase et l'amplitude de l'onde de l'objet étudié. Dans la zone de linéarité, la transmission en amplitude complexe du négatif est liée à l'énergie reçue par le support photosensible selon l'équation suivante :

La transmittance moyenne en amplitude pour cette exposition moyenne est notée . La valeur de ne doit pas trop s'éloigner du point de fonctionnement pour rester dans la zone de linéarité de la transmission, ce qui signifie que le réseau sinusoïdal doit être faiblement modulé. représente la valeur moyenne de l'exposition et s'écrit :

Nous avons donc : avec .

Ces équations montrent que la phase et l'amplitude du front d'onde objet sont enregistrées (ou codées) sur le support holographique. Il faut noter l'importance de la phase enregistrée car c'est elle qui donne l'impression de relief au cerveau lors de la restitution du front d'onde objet par stéréoscopie. Chaque élément de la surface du support holographique après enregistrement contient toute l'information du champ objet initial vu sous un angle donné.

Holographie par transmission

Le principe d'holographie par transmission est le plus répandu. Lors de l'enregistrement de l'hologramme, l'onde diffractée par l'objet et l'onde de référence se recombinent sur la même face du support photosensible.

Deux configurations d'enregistrement sont possibles : la configuration dite « off axis » (hors axe) et celle appelée « in line » (dans l'axe) :

La configuration « in line » (figure 4) fut la première exploitée par Gabor, le faisceau référence et le faisceau objet éclairent la plaque photosensible dans la même direction et dans le même sens. L'objet à étudier se situe entre la source et la plaque photosensible. Cette configuration ne nécessite pas de source fortement cohérente.


   
    Figure 4 : Principe d'enregistrement d'un hologramme transmission, configuration « in line »
Figure 4 : Principe d'enregistrement d'un hologramme transmission, configuration « in line » [zoom...]

La configuration hors axe a pu être exploitée lorsque les lasers sont apparus. En effet, celle-ci nécessite la présence d'une source fortement cohérente. Le faisceau objet et le faisceau référence ne sont pas confondus, le dispositif d'enregistrement hors axe est représenté figure 5.


   
    Figure 5 : Principe d'enregistrement d'un hologramme en transmission, configuration « off axis »
Figure 5 : Principe d'enregistrement d'un hologramme en transmission, configuration « off axis » [zoom...]

La source lumineuse doit présenter dans ce cas une forte cohérence spatiale et temporelle sauf si on peut assurer l'égalité parfaite entre les chemins optiques objet et référence. Le laser répond à ce type d'exigence. La longueur de cohérence est un paramètre déterminant ; cette caractéristique définit la différence de chemin optique acceptable pour qu'il y ait interférence entre les deux ondes.

Holographie par réflexion

Lors de l'enregistrement de l'hologramme, les deux ondes éclairent chacune une face différente du support photosensible. L'onde de référence et l'onde objet se propagent en sens inverse et interfèrent sur le plan d'enregistrement :


   
    Figure 6 : Principe d'enregistrement d'un hologramme en réflexion, interférences à deux ondes
Figure 6 : Principe d'enregistrement d'un hologramme en réflexion, interférences à deux ondes [zoom...]

Une autre technique consiste à utiliser un seul faisceau servant à la fois de faisceau objet et de faisceau de référence (figure 7), ce mode opératoire a été proposé par Y. Denisyuk [ ]. Le faisceau référence éclaire directement la plaque holographique et éclaire l'objet situé derrière la plaque à une très faible distance. L'onde ainsi diffractée par l'objet interfère avec l'onde de référence dans le plan de la plaque photographique (émulsion côté objet). Ce dispositif a pour avantage de n'utiliser qu'un seul faisceau laser, ce qui facilite sa mise en œuvre. Le champ objet peut ainsi être observé en lumière blanche.


   
    Figure 7 : Hologramme de Denisyuk
Figure 7 : Hologramme de Denisyuk [zoom...]

Cependant, bien que la qualité de restitution soit réaliste, la faible profondeur de champ de l'hologramme reste un inconvénient majeur. Comme tout hologramme de réflexion, les hologrammes de Denisyuk doivent être « blanchis », c'est-à-dire transformés en hologramme de phase, avant d'être fixés, afin que leur image puisse avoir une clarté et une luminosité suffisantes.

Les différents supports photosensibles

Afin d'obtenir un enregistrement correct de l'hologramme, il est nécessaire que le support soit sensible à la longueur d'onde de la source monochromatique utilisée. La réponse à l'éclairement de la plaque doit présenter une bonne linéarité. Les supports « analogiques » offrent de très bonnes résolutions généralement supérieures à (grain inférieur à )

Les hologrammes enregistrés sont classés selon deux catégories :

  • les hologrammes d'amplitude sont constitués d'un motif d'interférence qui se traduit par une variation du coefficient de transmission ou de réflexion sur le plan d'enregistrement ; ainsi l'amplitude du faisceau référence est modulée par l'hologramme.

  • les hologrammes de phase codent l'information par une variation de l'indice de réfraction ou de l'épaisseur du support photosensible, ce qui entraîne une modulation de phase du faisceau référence lors de la restitution.

Le tableau 1 récapitule les principaux matériaux constituant les supports photosensibles, leurs caractéristiques, ainsi que les processus de développement des négatifs [ , ].


   
    Tableau 1 : Caractéristiques des matériaux constituant les supports photosensibles
Tableau 1 : Caractéristiques des matériaux constituant les supports photosensibles [zoom...]

Les émulsions de type photographiques à halogénures d'argent sont les plus utilisées comme matériau d'enregistrement, elles ont l'avantage de présenter une grande sensibilité ainsi qu'une excellente résolution spatiale. Ce type de support permet l'enregistrement d'hologrammes d'amplitude ou de phase si on procède à un blanchiment du support.

Les gélatines bichromatées permettent la génération d'hologrammes de phase par réaction photochimique. La gélatine durcit en fonction de l'éclairement reçu. Le support est simplement lavé avec de l'eau chaude afin d'extraire la gélatine qui n'a pas été exposée au rayonnement. Ce matériau offre les meilleures résolutions spatiales.

Les supports photorésistants sont des films organiques photosensibles. Après exposition et développement, ils produisent des hologrammes de phase par variation de leur épaisseur. Ils sont peu utilisés à cause de leur faible sensibilité et des effets non linéaires qui apparaissent pour de faibles rendements de diffraction.

Les photopolymères sont des constituants organiques qui ont l'avantage de ne pas avoir à être traités par bains chimiques après l'exposition, ceci grâce à la photopolymérisation. L'information est codée par variation d'épaisseur et d'indice de réfraction de la couche.

Les photochromiques ont le grand avantage d'être réutilisables et ne nécessitent aucune préparation pour leur développement. Cependant leur résolution reste faible par comparaison aux supports argentiques. Leur faible sensibilité demande un temps de pose élevé.

Les photothermoplastiques présentent un certain confort étant donné qu'ils sont réutilisables et se développent sur place en peu de temps et sans bain chimique. Ce type de support a été largement utilisé en interférométrie holographique [ ] et a aujourd'hui quasiment disparu, ce qui stimule le développement de l'holographie numérique.

Les cristaux photoréfractifs permettent l'enregistrement d'hologrammes de phase dans un volume par effet photoréfractif. Ils sont souvent utilisés dans les applications d'interférométrie holographique en temps réel [ ]. La sensibilité spectrale de ces cristaux est relativement étroite. Cependant, ces solutions ont fait l'objet de commercialisations ; ainsi une société [ ] propose une caméra holographique utilisant un cristal de BSO pour support d'enregistrement. Cette caméra est dédiée à des applications en photomécanique.

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