Conception de capteurs optroniques

Probabilité de fausse alarme : choix du seuil

Revenons sur la logique du capteur, dite « à seuil », qui décide de la présence ou de l'absence de la cible si la tension mesurée lors d'un échantillonage est supérieure ou non à celle du seuil : la probabilité de détection d'un tel capteur est donc la probabilité pour qu'une mesure de la tension dépasse le seuil en présence de la cible ou du signal utile (par exemple sur une impulsion laser). Mathématiquement, elle est égale à l'intégrale, pour toutes les valeurs de tension supérieures à celle du seuil, de la loi de densité de probabilité de la tension, ps+b(v) applicable lorsque le signal utile est présent :

De la même manière, la probabilité de fausse alarme du capteur, PFA, est la probabilité qu'une mesure de la tension dépasse le seuil alors que la cible est absente (donc sur du bruit seul). Comme pour la probabilité de détection, la probabilité de fausse alarme du capteur est l'intégrale, au delà du seuil, de la loi de densité de probabilité de la tension, mais ici celle, pb(v), qui exprime les fluctuations de la tension dues à la seule présence du bruit :

Les lois de densité de probabilité du signal utile en sortie du détecteur peuvent prendre des formes très diverses, car la fluctuation du signal utile mesuré dépend de nombreux paramètres, qu'ils soient propres au capteur, tels que son mode de détection (directe ou hétérodyne), ou bien propres à la cible, tels que la cohérence du faisceau à capter (présence ou non de speckle ou de granularité laser) ou les variations de niveau dues au changement dans l'orientation de l'objet, ou encore aux deux, tels que le rapport entre la dimension de la pupille du capteur et celle des inhomogénéités en éclairement provenant de l'objet... Parmi les principales lois de densité de probabilité du signal utile, on citera les statistiques suivantes : fonction de Gauss, de Laplace (exponentielle négative), de Rayleigh, fonction Gamma, ...

En ce qui concerne la statistique des valeurs instantanées de la tension en l'absence de cible, les deux sources principales de bruit considérées ici, à savoir les bruits shot et thermique (Johnson), sont de type gaussien, si on se limite aux capteurs à détection directe. Conceptuellement, l'analyse de la performance des capteurs de détection optronique ne dépend pas du type de bruit présent, contrairement au comportement réel de ces capteurs, qui, pour un rapport signal à bruit donné, varie énormément en fonction de la loi de fluctuation du signal utile.

Dans le cadre de cette étude de cas, on se limite aux capteurs dont les lois de densité de probabilité du signal de sortie sont gaussiennes, aussi bien sur le « bruit seul » que sur le « signal utile plus bruit ». Bien que cette situation ne soit pas représentative de tous les capteurs optroniques de détection, elle en couvre une fraction suffisamment importante pour servir de base à la présentation générale qui suit.

Cette hypothèse étant admise, on exprime les lois de densité de probabilité de la tension instantanée, en absence et en présence de signal utile, sous les deux formes suivantes :

Dans ces conditions, la probabilité de détection et la probabilité de fausse alarme du capteur sont respectivement données par :

Le premier paramètre à définir dans la conception d'un système de détection optronique est la valeur de sa tension de seuil, valeur qui permet au système de satisfaire à la probabilité de fausse alarme requise. D'après le tableau ci-dessous, on peut constater qu'une probabilité de fausse alarme décroît très rapidement en fonction du rapport, vseuil /σv , entre la valeur de la tension de seuil et la valeur efficace de la tension de bruit. Par exemple, la probabilité de fausse alarme est égale à 10-3 pour une valeur de ce rapport égale à 3 ; à 10-9 pour un rapport de 6, à 10-12 pour un rapport de 7,...

En pratique, le paramètre généralement utilisé par le client dans le cahier des charges pour spécifier les fausses alarmes n'est pas la probabilité de fausse alarme, mais plutôt le « taux de fausse alarme ». Le TFA correspond au nombre de fausses alarmes que le client tolère par unité de temps ou par période d'utilisation du capteur, c'est à dire le nombre de fois où une crête de tension de bruit dépasse le seuil, ou le nombre d'alertes déclenchées par le capteur sur du bruit et non sur la cible (alertes non désirées), pendant l'une ou l'autre de ces durées. Le taux de fausse alarme est donc l'un des paramètres opérationnels fondamentaux de tout système de détection.

Comme cela a été mentionné précédemment, la probabilité de fausse alarme est la probabilité pour qu'une mesure de tension instantanée, effectuée en l'absence de cible, dépasse le seuil. Cette caractéristique n'apparaît pas dans le cahier des charges du capteur, parce qu'elle n'est pas connue de l'utilisateur, celui-ci étant intéressé par le taux de fausse alarme. Le concepteur doit transposer la valeur du TFA issue du cahier des charges en valeur de probabilité de fausse alarme, sur laquelle il établira le calcul du rapport vseuil/σv . La relation entre TFA et PFA se déduit du fait que le nombre de fausses alarmes issues du capteur pendant une certaine durée est le produit du taux de fausse alarme par mesure individuelle, qui n'est autre que la probabilité de fausse alarme, par le nombre de mesures élémentaires effectuées par le capteur pendant ce laps de temps, d'où l'expression générale de la PFA :

Par exemple, si le capteur mesure le signal sans discontinuer, pendant toute la durée considérée, le nombre de mesures effectuées est le produit de la durée en question par la fréquence d'échantillonnage du capteur, et il vient alors :

A la différence de l'utilisateur, le concepteur connaît la fréquence d'échantillonnage de son capteur, qu'il doit définir à partir du spectre du signal à détecter : en effet, suivant le théorème d'échantillonnage de Shannon, cette fréquence d'échantillonnage doit être supérieure ou égale au double de la fréquence la plus élevée contenue dans ce spectre (supposé borné).

Dans un certain nombre d'applications, le capteur ne réalise pas de mesures en permanence, mais seulement pendant une fraction du temps, et il est donc inutile de prendre en compte les informations délivrées en dehors des périodes utiles. Cela se produit typiquement dans le cas des télémètres à laser impulsionnel, si on connaît a priori la distance maximale, dmax , de la cible : si, par exemple, cette distance maximale est de 15 km cela signifie que le temps d'aller retour de l'impulsion laser sur la cible est au plus de :

Il est inutile de mesurer la tension au delà de cette durée, et l'on déconnectera le système, ce qui élimine ainsi tout risque de fausse alarme provenant de cibles jugées trop lointaines pour être détectées. Si le télémètre émet dix impulsions par seconde, chaque seconde d'utilisation effective du télémètre ne comporte que 10-3 s de mesures effectives, soit un pourcentage de temps consacré à la mesure, ou taux d'utilisation (Tu/T) de 10-3 . Si le capteur entre dans cette catégorie (non utilisation à plein temps des informations pendant la durée de fonctionnement), alors la relation entre son TFA et sa PFA est la suivante :

Cela permet au concepteur d'accepter une probabilité de fausse alarme beaucoup plus élevée, en réduisant les durées de prise en compte du signal aux seules périodes utiles. Comme le montre le paragraphe suivant, cette approche de réduction du nombre de mesures permet d'abaisser le seuil et ainsi d'augmenter la probabilité de détection, tout en conservant un taux de fausse alarme identique.

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